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mardi 13 septembre 2011

Le travelling mal-de-mer

A la télévision publique, hier, quelqu'un a évoqué le filmage d'une interview. Il existe une technique à deux caméras : la première filme le journaliste, la seconde filme la personne interviewée, c'est un peu plus compliqué à tourner (il faut 2 cameraman), facile à monter et lisible, car on travaille en plans fixes. J'ai vu le rédacteur en chef de l'édition, à qui j'en parlais, faire une moue amusée, et pour tout dire : condescendante.
 J'ai compris pendant le journal : il y avait une interview qui avait été filmée par un unique journaliste. Celui-ci, clairement désireux de montrer son savoir-faire, avait tout filmé en un seul plan en mouvement,  il passait d'une personne à l'autre, en suivant une figure en huit : serré sur la personne qui parlait, puis il élargissait et se retournait doucement pour aller filmer l'autre, tout le temps en mouvement. C'était plein de virtuosité et ça donnait le mal-de-mer.
  Ça m'a rappelé un match de foot de l'équipe de France 1998 où le jeune Zidane, désireux de montrer son savoir-faire, s'était fendu, d'une roulette, puis d'un dribble, avant de perdre bêtement la balle. Depuis le banc de touche, Aimé Jacquet avait fulminé. Le malaimé Jacquet avait raison : Si tu fais quelque chose de difficile, fais-le au moment où ce sera percutant ! Sinon, fais-toi oublier.
 Avec son mouvement permanent, le cameraman virtuose a réussi à ce qu'on ne voit jamais la personne interviewée car l'attention était accaparée par le mouvement qui occultait le visage. Quant aux paroles de la personne interviewée, le va-et-vient avait suffi à en tuer l'intérêt. Donc on a vu un grand mouvement de caméra, sur un sujet rendu secondaire, pauvre femme malmenée par un cameraman maladroit à force d'ignorer autrui...
 Dans une première version, j'ai parlé de mépris et je le regrette. La télévision en mal de rénovation cherche à se réformer et on a donné à un jeune cadreur mission de tourner en extérieur le journal de la locale et tous les plateaux. C'est un excellent cadreur, mais très formaliste, il se creuse beaucoup la tête pour dynamiser l'image... La première chose que j'ai vue de lui, c'était ce travelling peu discret et peu modeste, j'ai regardé d'autres plans, d'autres images, plus belles, plus respectueuses, plus dynamiques et de très bonne qualité : prions donc pour que l'expérience aidant, le padawan fasse le tri entre le précieux, le formel et l'utile (Quelque chose de simple, quelque chose d'utile, quelque chose de beau, disait le poète)

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