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mardi 17 janvier 2012

Le testament (Brassens)

Je serai triste comme un saule,
Quand le dieu qui partout me suit,
Me dira, la main sur l'épaule :
« Va-t-en voir là-haut si j'y suis. »
Alors, du ciel et de la terre
Il me faudra faire mon deuil...
Est-il encore debout le chêne
Ou le sapin de mon cercueil ?
                    -
S'il faut aller au cimetière,
J'prendrai le chemin le plus long.
J'ferai la tombe buissonnière,
J'quitterai la vie à reculons...
Tant pis si les croque-mort me grondent,
Tant pis s'ils me croient fou à lier,
Je veux partir pour l'autre monde
Par le chemin des écoliers
                    -
Avant d'aller conter fleurette
Aux belles âmes des damnées
Je rêv' d'encore une amourette
Je rêv' d'encore m'enjuponner...
Encore une fois dire : « Je t'aime »
Encore une fois perdre le Nord
En effeuillant le chrysanthème
Qui est la marguerite des morts.
                    -
Dieu veuille que ma veuve s'alarme
En enterrant son compagnon
Et qu'pour lui faire verser des larmes,
Il n'y ait point besoin d'oignons.
Qu'elle prenne en secondes noces
Un époux de mon acabit :
Il pourra profiter d'mes bottes
Et d'mes pantoufle' et d'mes habits.
                    -
Qu'il boiv' mon vin, qu'il aim' ma femme,
Qu'il fume ma pipe et mon tabac,
Mais que jamais — Mort de mon âme ! —
Jamais il ne fouette mes chats...
Quoique je n'ai pas un atome,
Une ombre de méchanceté,
S'il fouette mes chats, y a un fantôme
Qui viendra le persécuter.
                    -
Ici gît une feuille morte,
Ici finit mon testament,
On a marqué dessus ma porte :
« Fermé pour cause d'enterrement. »
J'ai quitté la vi' sans rancune;
J'aurai plus jamais mal aux dents :
Me v'là dans la fosse commune,
La fosse commune du temps.

Georges Brassens
et voici son interprétation

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