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dimanche 19 février 2012

Les vieux (Jacques Brel)

Les vieux ne parlent plus ou alors seulement
Parfois du bout des yeux.
Même riches ils sont pauvres, ils n'ont plus d'illusion
Et n'ont qu'un cœur pour deux
Chez eux ça sent le thym, le propre, la lavande
Et le verbe d'antan
Que l'on vive à Paris, on vit tous en province
Quand on vit trop longtemps
Est-ce d'avoir trop ri que leur voix se lézarde
Quand ils parlent d'hier
Et d'avoir trop pleuré que des larmes encore
Leur perlent aux paupières
Et s'ils tremblent un peu est-ce de voir vieillir
La pendule d'argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui, qui dit non,
Qui dit : je vous attends

Les vieux ne rêvent plus, leurs livres s'ensommeillent,
Leurs pianos sont fermés
Le petit chat est mort, le muscat du dimanche
Ne les fait plus chanter
Les vieux ne bougent plus leurs gestes ont trop de rides
Leur monde est trop petit
Du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil
Et puis du lit au lit
Et s'ils sortent encore bras dessus bras
Dessous tout habillés de raides
C'est pour suivre au soleil l'enterrement d'un plus vieux,
L'enterrement d'une plus laide
Et le temps d'un sanglot, oublier toute une heure
La pendule d'argent qui ronronne au salon,
Qui dit oui qui dit non, et puis qui les attend

Les vieux ne meurent pas, ils s'endorment un jour
Et dorment trop longtemps,
Ils se tiennent la main, ils ont peur de se perdre
Et se perdent pourtant
Et l'autre reste là, le meilleur ou le pire,
Le doux ou le sévère
Cela n'importe pas, celui des deux qui reste
Se retrouve en enfer
Vous le verrez peut-être, vous la verrez parfois
En pluie et en chagrin
Traverser le présent en s'excusant déjà
De n'être pas plus loin
Et fuir devant vous une dernière fois
La pendule d'argent
Qui ronronne au salon qui dit oui qui dit non
Qui leur dit : je t'attends
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non
Et puis qui nous attend.

Chanson écrite et chantée par Jacques Brel
(1929-1978)

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