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jeudi 12 juillet 2012

La fin de la colère

Déni / Colère / Acceptation : ces trois mots jetés à la face de Google, avec l'idiote volonté d'agresser le moteur, de le plonger dans l'embarras me conduisent sur une page inattendue : le deuil et la mémoire...
 A la mort de ma mère, j'ai été longtemps en colère contre elle. Passé le choc, j'ai oscillé entre colère, acceptation et j'ai tourné en rond de l'un à l'autre — des années entières — revenant sans cesse à la colère sans que le deuil ne se fasse. Son décès a produit des effets que je ne maîtrise toujours pas, libérant des forces qui œuvraient sans pouvoir s'exprimer. L'année qui a suivi sa mort est suivie par un véritable déluge d'écriture... 
 Quand la colère a-t-elle cessé ? Curieusement, j'ai une date et une circonstance... ridicule.
 C'est la sensation du ridicule qui a gravé en moi cette circonstance. Ma mère est décédée en décembre 1982, j'étais étudiant dans une voie qui ne me convenait pas, je voulais devenir quelqu'un d'autre, mais je ne savais ni qui ni quoi. Je savais juste que je n'étais pas du tout taillé pour la vie d'ingénieur, marié, père de famille à laquelle me destinait ma mère. Mes études avaient été droites : bac C, classes préparatoires difficiles, mais surmontées, école d'ingénieurs en informatique et le début du refus...
 Des années plus tard, je me rends en voiture chez des amis qui m'ont invité à dîner, on est à Paris, un samedi gris et pluvieux. Je suis là, à attendre dans les embouteillages, à ressasser ma vie, bloqué dans une vieille voiture déglinguée et sympathique, à me demander comment j'ai fait pour tout rater dans ma vie.
 Au fond, les embouteillages sont parfaits pour ruminer. Mon esprit dérive vers une vieille dispute avec ma mère, jamais résolue, et pour cause, sa mort m'a privé de ce combat oratoire jubilatoire où j'aurais pu lui jeter à la face que... La colère monte, monte et éclot dans ma conscience comme une bulle qui crève l'eau. Une question me vient à l'esprit : Depuis combien de temps ma mère est morte ?
 1999-1982 = dix-sept années à ronger ma colère contre celle qui voulait que je devienne ce qu'elle avait décidé. Dix-sept ans, et les embouteillages dans Paris, je me suis dit qu'après tout ce temps, je pouvais lui pardonner... et j'ai ri.
 Cette blague, pour idiote qu'elle soit, m'a libéré de la colère et j'ai pu dès lors penser à ma mère plus calmement, et retrouver, sous la colère qui ne demande qu'à se ranimer, l'amour que l'enfant et l'adolescent que je fus lui portait. Un amour qui accepte que cette personne — par amour ! — ait voulu de toute sa volonté - et elle en avait - faire de moi le pantin de ses désirs et une acceptation qui me permet de l'aimer...

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