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jeudi 28 novembre 2013

Psych- (surtout pas de)

  J'avais plus de trente ans : du mal-être, des ratages, des blocages, des échecs amoureux à ne plus savoir qu'en faire. Des amis m'avaient si souvent vanté leur « psy » -chiatre, -chanalyste, -chothérapeute, que je me résolus à les imiter. Ils disaient tous qu'ils avaient changé, je ne voyais pas en quoi la maladie avait cessé de les dévorer, mais, pour changer, j'étais prêt à payer. Que ne ferait-on pas pour changer ?
J'obtins un rendez-vous chez une psychanalyste-psychiatre. Dans le cabinet, trônait un divan, mais la femme me fit signe que non, pas pour moi, elle me désigna (froidement) une chaise (austère) et s'assit derrière son bureau. Elle m'énonça qu'elle avait assez de clientèle et qu'elle ne désirait pas en prendre plus, mais qu'elle me recevait pourtant, et m'expliqua que les psys se fiaient à leur première impression. À son regard, à ses yeux, le message était d'une grande clarté : la consultation était achevée avant d'avoir débuté.
Mépris ? Dégoût ? Hostilité ? Je ne saurais dire, mais c'était une chose concrète, palpable. Que je suscite une telle hostilité a priori m'avait plus sûrement désarçonné que son discours de femme d'affaires. C'était une femme plutôt belle, hautaine, sûre de ses opinions, quelqu'un de désirable aussi, et quand elle précisa qu'elle ne me recevait que pour m'entendre dire « ce qui n'allait pas dans ma vie », moi qui suis un bavard impénitent, elle m'a coupé le sifflet.
Total.
Cinq minutes de silence. Impossible de dire le moindre mot, je voyais son impatience, j'entendais son autorité, son désir visible de me réduire d'un mot brutal. Elle était pressée. Que dire à ce mépris plein d'idées reçues ?
Evidemment, cette haine/dégoût me renvoyait à mes échecs et les accentuait au lieu de les soigner : je ne prends pas de clients laids, proclamait-elle froidement. En désespoir de cause, elle me lança un appât du genre : « C'est avec les filles, que ça ne va pas ? ».
Peut-être gênée, elle ajouta, plus hautaine encore, qu'il y avait des gens qui vivaient seuls, et qui avaient une vie épanouie. Pour cet unique conseil, elle ne m'a pas fait payer, mais j'étais tellement catastrophé que je l'aurais fait. J'avais adoré Freud, Young, Dolto, Cyrulnik... Je pense que j'ai eu affaire à une « incompétence diplômée », mais peut-être dois-je la remercier de m'avoir sauvé de la psy-chose ?

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