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dimanche 26 mai 2013

Rosa rosa rosam (Jacques Brel)

Refrain :
Rosa rosa rosam
Rosae rosae rosa
Rosae rosae rosas
Rosarum rosis rosis
-
C'est le plus vieux tango du monde
Celui que les têtes blondes
Ânonnent comme une ronde
En apprenant leur latin
C'est le tango du collège
Qui prend les rêves au piège
Et dont il est le sacrilège
De ne pas sortir malin
C'est le tango des bons pères
Qui surveillent l'œil sévère
Les Jules et les Prosper
Qui seront la France de demain.
               Refrain
C'est le tango des forts en thème
Boutonneux jusqu'à l'extrême
Et qui recouvrent de laine
Leur cœur qui est déjà froid
C'est le tango des fort en rien
Qui déclinent de chagrin
Et qui seront pharmaciens
Parce que papa ne l'était pas.
C'est le temps où j'étais dernier
Car ce tango rosa rosae
J'inclinais à lui préférer
Déjà ma cousine Rosa
               Refrain
C'est le tango des promenades
Deux par seul sous les arcades
Cerclé de corbeaux et d'alcades
Qui nous protégeaient des pourquoi
C'est le tango de la pluie sur la cour
Le miroir d'une flaque sans amour
Qui m'a fait comprendre un beau jour
Que je ne serai pas Vasco de Gama
Mais c'est le tango du temps béni
Où, pour un baiser trop petit,
Dans la clairière d'un jeudi
A rosi cousine Rosa
               Refrain
C'est le tango du temps des zéros
J'en avais tant des minces, des gros,
Que j'en faisais des tunnels pour Charlot
Des auréoles pour Saint-François,
C'est le tango des récompenses
Qui allaient à ceux qui ont la chance
D'apprendre dès leur enfance
Tout ce qui ne leur servira pas
Mais c'est le tango que l'on regrette
Une fois que le temps s'achète,
Et que l'on s'aperçoit, tout bête,
Qu'il y a des épines aux Rosa
               Refrain
 Ah, « Le miroir d'une flaque sans amour... » rien que pour ce vers, c'est une chanson extraordinaire. Derrière, il y a la suggestion d'une séquence de cinéma : le pied capricieux de Rosa tape dans la flaque,  arrose Brel, qui n'en peut mais, et qui, immobile, regarde s'éloigner l'adolescente... beaucoup d'épines aux Rosa.
Pour le « Tango des forts en thème, boutonneux jusqu'à l'extrême et qui recouvrent de laine leur cœur déjà froid », mes propres souvenirs du collège me donnent envie de vomir, puis de donner des claques à ce prétentieux, ce poseur, ce frimeur. Ce que j'ai pu le détester pour cette hypocrisie M'as-tu-vu de moraliste étriqué. Les premiers de classe sont eux aussi des marginaux, et ils souffrent d'avoir été exclu du groupe, à cause de cette intelligence dont la seule clef serait de se rabaisser ? 
 Dilemme : 
  • ou je fais le singe pour ressembler aux autres, et je me méprise, 
  • ou je me drape dans la provocation et, en plus d'être intelligent, je travaille beaucoup,  beaucoup, avec le désir de faire reculer cette masse ricanante.
 Nulle échappatoire honorable. La solitude, le lot des exclus, premiers de classe, malades, estropiés de la vie... Il y a bien des désagréments à être premier de sa classe, je me demande parfois s'il n'y avait pas que ça, des désagréments ? 
 Une comparaison avec une chanson de la même époque : des roseaux chantent à tue-tête la fable du Chêne et du roseau à un chêne, qui, lassé, se déracine et part sur le chemin... Brassens ajoute : « Mais, moi qui l'ai connu, je sais qu'il en souffrit, de quitter l'ingrate patrie... ». Pour les avoir entendues ces rosae chantées à tue-tête par des braillards persuadés de leur non-conformisme et croyant qu'il suffit de gueuler en meute pour se croire anarchistes... 
 Il m'arrive aussi de mépriser Brel. La chanson est belle, néanmoins, malgré son idéologie racoleuse et sa démagogie. La version que j'ai trouvée, commence par une publicité, hélas, mais elle est suivie d'une perle, l'ancêtre du clip, un véritable scopitone ! Chanson !

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