« Ma vie. » Quand je pense à ces mots, je vois devant moi un rayon de lumière. Et, à y regarder de plus près, je remarque que cette lumière a la forme d'une comète et que celle-ci est pourvue d'une tête et d'une queue. Son extrémité la plus lumineuse, celle de la tête, est celle de l'enfance et des années de formation. Le noyau, donc la partie la plus concentrée, correspond à la prime enfance, où sont définies les caractéristiques les plus marquantes de l'existence. J'essaie de me souvenir, j'essaie d'aller jusque-là. Mais il est difficile de se déplacer dans cette zone compacte : cela semble même périlleux et me donne l'impression d'approcher de la mort. Plus loin, à l'arrière, la comète se dissout dans sa partie la plus longue. Elle se dissémine, sans toutefois cesser de s'élargir. Je suis maintenant très loin dans la queue de la comète : j'ai soixante ans au moment où j'écris ces lignes.
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Nos premières expériences, pour la plupart, nous sont inaccessibles. Les chroniques, les souvenirs de souvenirs, les reconstitutions se fondent sur un choix de sentiments qui subitement s'enflamment. Mon souvenir le plus ancien est celui d'un sentiment, un sentiment de fierté...
début de « Les souvenirs m'observent », (Castor Astral, 2004)
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Je ne sais plus comment ce volume est arrivé chez moi. Peut-être l'ai-je trouvé chez un libraire, oublié en toute injustice pendant plusieurs années, avant qu'il ne ré-émerge au hasard d'un rangement cette semaine. Curieusement, j'ai retrouvé, intacte, la sensation que j'avais ressentie devant cette préface lumineuse. Pourquoi l'ai-je oubliée alors ? Je ne le saurais sans doute pas, je prends souvent plus de plaisir à courir qu'à m'arrêter et regarder autour de moi. Tomas Tranströmer est suédois, né en 1931 à Stockholm, il a été prix Nobel de littérature en 2011.
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