La charrette qui vient du fond de ton enfance
Comment peut-elle encor gémir en avançant,
Elle qui dort si mal au creux de ta mémoire
Ne devrait pas ainsi affronter le présent.
Mais tourne-toi plutôt vers cette grande glace,
Affronte ce visage issu de maintenant,
Ou bien combien de fois faudra-t-il redire
Que le reste n'est plus que mort et souvenir,
Et que, seul, ton regard qui ne peut se rider
Sait venir de très loin pour aboutir si près
Qu'il te donne le vertige des précipices,
Et tu baisses les yeux par crainte de tomber.
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« La Fable du monde » 1938 Jules Supervielle
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