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jeudi 25 janvier 2018

Se souvenir

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Quand j'ai eu quarante ans, en 2000, est paru mon premier roman : « Le Souffle du rêve », et pour moi c'était une ouverture au monde très tardive, j'avais perdu mon temps à vouloir faire du cinéma, à tort sans aucun doute, mais il m'avait fallu ces quinze années pour comprendre que la littérature était ce que j'aimais et la meilleure façon de vivre pour moi.
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Je l'ai dédié à une personne que je ne connaissais pas, mais dont l'exemple était un phare depuis que j'avais vingt ans, que j'avais lu Le Collier de Semlé et Le Monde de Rocannon : Ursula K. LE GUIN (ne pas oublier le 'K', elle y tenait, au K de son nom de jeune fille, Kroeber, le nom de son père).
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J'ai écrit à un éditeur, qui m'a donné le nom et l'adresse de son agent, qui m'a donné le nom et l'adresse de son agent aux U.S.A. à qui j'ai écrit une lettre, en français. Une amie l'a traduite, j'ai supporté l'ironie de son regard et ai envoyé le livre et la lettre.
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Deux mois plus tard, j'avais oublié, il y avait une  lettre de l'Oregon dans ma boite-à-lettres, je ne savais même pas où c'était, l'Oregon, et c'était une lettre de l'écrivain que j'admirais le plus au monde, qui me remerciait et me disait qu'elle aussi avait écrit une histoire sur des gens avec des ailes et que pour elle aussi, c'était une histoire assez triste, et de conclure : 
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« May be that the only only wings that can make us happy are whose of the spirit ? »
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Et là, c'était tout elle, une façon de rompre la glace et de faire vous oublier votre timidité. Plus tard, j'ai eu l'occasion d'être son éditeur, et je peinais à lui écrire les courriers pour les corrections et à les traduire en anglais, et c'est elle, qui avait fait toutes ses études en France, qui a un jour m'a dit : « Vous savez, je commence par lire votre lettre en Français, puis après en Anglais », elle s'amusait beaucoup des erreurs des traducteurs automatiques, ou des locutions typiquement françaises qui pouvaient m'échapper, « Requins de la finance » l'avait amusé (C'est comme ça que vous dites ?), et elle ne manquait pas d'évoquer les souvenirs qu'elle avait gardés de la Loire, où elle avait entendu,  pour la première fois, le chant du coucou.
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Et c'est avec une simplicité confondante qu'elle avait répondu à mes questions pour l'interview que je lui avais proposée pour la sortie du Pêcheur... Répondant même aux questions un peu trop curieuses, et embarrassantes, avec toute son élégance. Qu'elle reste vivante en nos mémoires ! Et que son écriture, si concise, si précise, si forte d'évocations croisées, si riche de personnages aux espoirs têtus, reste un modèle pour tous les écrivains...
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